DE LA BAGARRE AUX BEAUX ARTS EN 1935

Santiago, le 18 Juin 1935. Journal «  El IMPARCIAL » (Page 9) (suite)

*Boche= Bagarre aux Beaux Arts.

Monsieur Le Directeur de « EL IMPARCIAL »

Je vous remercierais pour la publication de ces lignes.

Quelques professeurs de l'académie de Beaux Arts de l'Université du Chili, m'ont dédié un long article dans « EL MERCURIO » du samedi 15 de ce mois ci, en réponse à un petit paragraphe d'explication, signé par l'élève Raul Uribe, dans lequel il laissait au clair que le Cours supérieur de cette académie Universitaire avait émigré massivement en réponse, comme conséquence de la politique politicienne régnante au sein de la Faculté et avait fondé l'Académie Libre des Arts Plastiques, sous la direction du suscrit.

Protestation des Messieurs de Beaux Arts de l'amputation de la politique politicienne.

Ils assurent : « que l'action perturbatrice du Professeur Gazmuri, son esprit de prépondérance en rien justifié n'était pas l'exemple d'harmonie dans le travail commun . »

La réorganisation produite , tout le personnel de l'Académie fût relu à exception de Monsieur Gazmuri », etc., etc.,

Ils pourraient m'épargner dignement de filer ces lignes. La phrase : « Bagarre aux Beaux Arts », c'est déjà proverbial et tout le monde sait ce que cela veut dire. Un essai de Freud ou un roman de Dostoïevski illustrerait le sujet merveilleusement.

« La réorganisation produite » !...La cinquantième réorganisation serait nécessaire d'ajouter dans ce cas précis !...

Et que fit la réorganisation ?

Une Commission de personnes sans tâche éloignée des « harmonieuses » luttes artistiques de la Faculté elle-même.dans l'intimité « du travail commun » et apolitique.

« Tout le personnel fut relu à l'exception du Professeur Gazmuri ».

Ils ne serviraient mieux leurs intérêts ces messieurs en gardant un silence discret ?

On réalisa un Concours qui constitua la mascarade la plus honteuse et grossière des annales de l'Université.

L'épreuve consistait dans le développement par écrit d'un thème donné à 9 heures du matin pour être soutenu entre 18 et 21 heures du même jour.

Sujet : Analyse de la forme dans une ouvre de Giotto, Titien et Cézanne, et Classicisme, Impressionnisme et Cubisme.

La séance fut privée. Extrêmement privée. La Commission ne l'a pas présentée. Pourquoi ? Tant de formalité si tout était arrangé d'avance.

*Les participants arrivèrent chacun avec sa bibliothèque sous le bras et s'installèrent confortablement pour.copier !

J'ai été reçu au concours dans les deux thèmes. J'invite le public à examiner les textes, les notes et les épreuves. J'imagine qu'elles se trouvent à sa disposition dans les archives de la Faculté .

Mais le vote apolitique de la Faculté m'a dépouillé, dépossédé de ma chaire.

Aux Beaux arts on confond cause et effet. On confond trop de choses. Pablo Burchard, Guevara, Caballero, etc.

En invoquant « l'harmonie du travail en Commun » !...Le diable en train de vendre des croix.

*En décembre 1932 (avait deux années d'exercice la réorganisation de la quarante-neuvième en avril 1932) les élèves de mon cours (dessin ), présentèrent une demande à la Faculté , demandant qu'il me soit autorisé de réaliser un cours de Peinture et composition à part du titulaire de Dessin, qui existait déjà, et où ils pourraient continuer leurs études, en vue «  de l'échec expérimenté avec les « professeurs Guevara, maintenant nommé par son « sans gêne » et Caballero. »

La Faculté autorisa la mesure.

En raison de la cinquantième réorganisation décrétée par l'Université, les élèves de mon cours, au courant comme l'était tout le monde de la vraie finalité, qui n'était autre que me priver de ma chaire, présentèrent une nouvelle pétition , laquelle demanda l'intégralité de celle-ci, prenant comme argument les raisons de haute efficacité pédagogique, droiture, et enthousiasme artistique.

La dite demande, malgré avoir été remise personnellement au Recteur de l'Université par la Commission des élèves, s'est perdue.

On l'a refaite et on l'a remise pour la seconde fois.

Le concours s'est réalisé avec les résultats connus et attendus.

Il suffirait de ceci. Mais il y a plus.

Mon « manque d'harmonie » dans le travail en commun » :

1. J'ai soutenu que l'inaptitude de l'Administrateur Burchard faisait urgent et nécessaire la nomination d'un Directeur de Culture responsable et la suppression d'un conseil de Direction qui ne dirigeait rien. La même Faculté remplaça Burchard par Monsieur Carlos Humeres.

2. J'affirme la nécessité de séparer les Ecoles, Académies et l'Ecole des Arts Appliquées, que l'hégémonie politique des professeurs de cette dernière avait la prétention de fusionner. Le Conseil détermina la séparation.

3. J'ai défendu la nécessité d'amplifier l'Académie. Elle comportait à peine trois chaires et un budget de 56.000 $ (pesos).

L'hégémonie politique et budgétaire du Conservatoire et de l'Ecole des Arts Appliquées, avait transformé l'académie en Cendrillon de la famille. Le Conseil augmenta au nombre de sept les chaires et son budget à $ 150.000. (Pesos).

4. J'ai soutenu la nécessité d'aider les élèves investissant de l'argent dans l'achat de matériels, couleurs, etc. à prix coûtant.

L'hégémonie du budget du conservatoire de Musique et de l'Ecole de A.A. s'opposait. Cependant les couleurs viennent de parvenir la semaine dernière.

Je pourrais continuer indéfiniment.

Ceci pour ce qui est de l'interne.

Pour ce qui est de l'artistique et de l'enseignement :

J'ai été nommé Professeur de Dessin. Il était juste que j'enseigne le dessin.

L'adhésion de mes élèves et leur enthousiasme se traduisit en « prépondérance  ». Cet enthousiasme fut partagé en 1932 par l'Administrateur Burchard et le Directeur de l'Ecole des Arts Appliquées, lesquels déclaraient que « j'étais le plus grand professeur de dessin qui était passé par l'Académie ». C'était la gloire ! Peu après on a découvert que le dessin était en désaccord avec l'art des « taches et les brosses des murs », que pratiquaient tous les « professeurs » de la Faculté , imitation, et répétiteurs de l'impressionnisme de 1870. l'université croit que l'Art Nouveau a un demi siècle ! Notre jeune poète serait don Samuel Lillo. Pablo Burchard est « Maître des Maîtres ».

La doctrine de l'Art Nouveau exige construction, forme, dessin, composition.Il est nécessaire d'abandonner la commodité des « taches », des « taches savoureuses » et approfondir. Une activité spirituelle. Une nouvelle conscience règne dans l'Art.

(Regardez comme ici Gazmuri écarte toute possible filiation avec le « Groupe Montparnasse » en dénonçant le manque de talent du peintre Burchard, et ainsi sa critique s'étend vers les autres peintres chiliens avec lesquels l'on veut de manière forcée le lier, lisez comment Gazmuri vous dit le plagiat qu'ils commettent à l'encontre des véritables maîtres de l'Ecole de Paris !)

Une nouvelle Critique était nécessaire.

Dans la Revue d'Art de la Faculté il fallait diffuser des vraies doctrines, abandonner la complaisance d'ouvres médiocres et cesser de mystifier le public.

Dans les salons officiels, les prix sont repartis sans honte par tour de rôle entre Jurys et exposants. Exposants et Jurys.

Les plagiats de Grigorief, de Franz Marc, de Matisse, de Renoir, Vlaminick, Modigliani, Friesz, Bourdelle, Despiau, etc., furent désignés par le public et ils constituent le commentaire de style badin des cercles artistiques.

J'ai signalé l'inflation bureautique (dans la Faculté , il y a plus de bureaux que dans un Ministère). Le favoritisme etc.

Tant de  « perturbation » ne pouvait pas continuer. « Le travail en commun et lucratif.a besoin de la complaisante paix du ciel.

« L'harmonie » règne aux Beaux Arts, pour le prestige de l'Université, professeurs ineptes et dévergondés, répudiés par leurs élèves et par le jugement public, continuent dans leurs postes.

A Monsieur Le Directeur

Cordiales Salutations.

HERNÁN GAZMURI

 

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